Les contes pour enfants sont source de sagesse. Sinon pour quelle raison traverseraient-ils les époques? Cendrillon s’efforcera de quitter le bal avant minuit ; le Petit Chaperon rouge se méfiera du loup et de sa voix enjôleuse ; la Belle au bois dormant se gardera d’approcher son doigt de ce fuseau à l’attrait irrésistible ; Blanche-Neige se tiendra éloignée des chasseurs et sous aucun prétexte ne mordra la pomme, si rouge, si appétissante, que le destin lui tend… Autant d’avertissements que toute jeune personne ferait bien de suivre à la lettre.
Vanessa Springora, Le Consentement, Paris, Grasset, 2020.
Le témoignage extrêmement poignant de Vanessa Springora débute ainsi. Ce prologue édifiant est une mise en garde à la fois pour le lecteur et pour toutes les autres personnes qui pourraient ou ont été témoins d’événements similaires à ce qu’à vécu l’auteure dans son enfance.
Résumé de l’éditeur
Séduite à l’âge de quatorze ans par un célèbre écrivain quinquagénaire, Vanessa Springora dépeint, trois décennies plus tard, l’emprise que cet homme a exercé sur elle et la trace durable de cette relation tout au long de sa vie de femme. Au-delà de son histoire intime, elle questionne dans ce récit magnifique les dérives d’une époque et la complaisance d’un milieu littéraire aveuglé par le talent et la notoriété.
Ce témoignage a bouleversé la rentrée littéraire de 2020, Vanessa Springora a un talent certain pour l’écriture. La dureté des faits relatés contrastent étonnement avec la beauté du style d’écriture de l’auteure. Et c’est ce qui rend encore plus compliqué la lecture de ce texte, comment le beau peut rencontrer le laid. Parce que oui, il faut le dire ce n’est pas une belle histoire, ce n’est même pas une histoire comme on l’entend souvent, une fiction. Il s’agit de faits réels qui sont passés sous silence pendant des années et que beaucoup ont cautionnés en jouant sur la définition juridique du Consentement. Je pense que c’est une lecture qu’il faut absolument découvrir, c’est un texte qui se doit de toucher un maximum de personnes.
Et surtout, ce livre fait partie de ceux qu’il faut lire dans le sens où vous en parler pendant des heures ne vous permettra pas de comprendre ce que l’auteure nous dit. Les mots sont choisis avec une grande intelligence, le rythme crée au fil des pages illustre la dureté des propos de l’auteure. Qu’on se le dise, Vanessa Springora ne mâche pas ses mots, elle ne nous épargne rien de ce qu’elle a subit et c’est ce qui fait authenticité de ce roman. Vous l’aurez compris, c’est une lecture que je recommande fortement.
Je vous laisse ici quelques extraits…
Certains enfants passent leurs journées dans les arbres. Moi, je passe les miennes dans les livres. Je noie ainsi le chagrin inconsolable dans lequel l’abandon de mon père m’a laissée. La passion occupe tout mon imaginaire. Je lis, trop tôt, des romans auxquels je ne comprends pas grand-chose, si ce n’est que l’amour fait mal. Pourquoi souhaite-t-on si précocement être dévoré?
Vanessa Springora, Le Consentement, p. 29.
G. ne se démonte pas. Sa voix me susurre des mots réconfortants :
– Ce n’est pas grave. En attendant, on peut faire autrement, tu sais.
De même que l’on doit se signer à coups d’eau bénite avant de franchir le seuil d’une église, posséder corps et âme une jeune fille ne se fait pas sans un certain sens du sacré, c’est-à-dire sans un rituel immuable. Une sodomie a ses règles, se prépare avec application, religieusement.
Vanessa Springora, Le Consentement, p. 55.
Titre : Le Consentement
Auteur : Vanessa Springora
Éditeur : Grasset
Nombre de pages : 206 pages
Prix : 18€
Date de sortie : 2 janvier 2020
ISBN : 978-2-246-82269-1