Sa Majesté des Mouches – William Golding

Hello ! Aujourd’hui on continue à améliorer sa culture G avec la lecture d’un classique de la littérature d’aventure, Sa Majesté des Mouches de William Golding, qui fut publié en 1954. Beaucoup aura déjà été dit sur ce classique souvent longuement étudié au collège et dans les facultés, alors je ne vois pas l’utilité d’en faire une très longue analyse vue et revue (et probablement mieux analysé que moi-même), même si je vous parlerai brièvement des thèmes qui y sont abordés et qui m’ont marqués. J’appuierai surtout sur mon avis global en tant que lectrice 😉

Les jumeaux portaient la carcasse qui se balançait entre eux et laissait tomber des gouttes noires sur les pierres. Un seul sourire, satisfait et béat, semblait se partager entre leurs deux visages. Jack voulait tout raconter à la fois à Ralph. Il esquissa un pas de danse, mais, se rappelant sa dignité, il s’immobilisa avec un grand sourire. Baissant les yeux sur ses mains, il aperçut du sang et fit une grimace de dégoût. Il chercha quelque chose pour les essuyer et les frotta sur sa culotte. Puis il rit.

Résumé de l’éditeur :

Une bande de garçons de six à douze ans se trouve jetée par un naufrage sur une île déserte montagneuse, où poussent des arbres tropicaux et gîtent des animaux sauvages. L’aventure apparaît d’abord aux enfants comme de merveilleuses vacances. On peut se nourrir de fruits, se baigner, jouer à Robinson.
Mais il faut s’organiser. Suivant les meilleures traditions des collèges anglais, on élit un chef. C’est Ralph, qui s’entoure de Porcinet, «l’intellectuel» un peu ridicule, et de Simon.
Mais bientôt un rival de Ralph se porte à la tête d’une bande rivale, et la bagarre entre les deux bandes devient rapidement si grave que Simon et Porcinet sont tués. Ralph échappe de justesse, sauvé par l’arrivée des adultes.
Ce roman remarquable a un sens allégorique qu’il n’est pas difficile de comprendre : c’est l’aventure des sociétés humaines qui est tragiquement mise en scène par les enfants. Mais l’œuvre vaut avant tout par la description de leur comportement et par l’atmosphère de joie, de mystère et d’effroi qui la baigne.

 

Mon avis :

Entre mes mains, j’avais une édition de 2007 pour laquelle la traduction n’avait jamais été revue. Cela va sans dire qu’elle aurait bien eu besoin d’être dépoussiérée. Et je crois que malheureusement cela n’a pas été fait depuis. L’écriture est un peu vieillotte, à l’ancienne – en même temps ce livre n’est plus tout jeune me direz-vous, toutefois pour d’autres livres que j’ai pu lire, cela est moins gênant. Pour certains classiques je suis époustouflée par les talents de l’écrivain (comme pour Fahrenheit 451 récemment), dans ce cas précis je n’ai pas particulièrement apprécié le style, que j’ai trouvé plutôt fade et scolaire.

On notera rapidement que pour de la littérature de jeunesse, c’est un roman assez violent par certaines scènes. La lecture en est probablement plus appréciable à l’âge adulte pour en saisir toute la portée ; mais en contrepartie on en perdra le côté horrifique qui fonctionnera surtout pour un lectorat jeune. De plus, le narrateur porte réellement un regard d’adulte, en rationalisant les causes d’événements perturbants ou affolants pour les enfants (comme l’origine du monstre) avant même que l’on ait pu s’en inquiéter. Comme pour souligner l’irrationalité de l’enfance au travers d’interprétations rendues farfelues par la peur.

Ce roman illustre la cruauté de l’enfance, et d’ailleurs cet aspect m’a fait penser à Peter Pan de James Barrie (surtout par le personnage de Jack). La plupart des enfants n’anticipent pas et ne réfléchissent pas aux conséquences de leurs actions. Toutefois je n’ai pas trouvé très réaliste ce glissement très facile vers le meurtre aussi jeune, même si l’auteur insinue que pour des enfants c’est un jeu et qu’ils ne se rendent pas compte de la réalité. Les plus âgés prennent le pouvoir et les décisions, dans un semblant d’élection démocratique, même si au final ils n’en font qu’à leur tête oubliant vite les objectifs et le bien commun du groupe. Les petits errent sans but, sans jamais vraiment s’intégrer à cette communauté bancale.

Au final les adultes restent leur point d’ancrage, c’est eux qui régissent la vie des enfants et savent la cadrer. Les enfants essayent d’en faire une piètre imitation mais n’arrivent pas à s’y tenir. Cela les fait souvent regretter le manque d’une présence adulte avec eux. C’est d’ailleurs par eux seuls que le salut semble pouvoir venir.

Il faut probablement replacer ce roman dans son contexte d’écriture : la période d’après-guerre. Les esprits ont été fortement marqués par la Seconde Guerre Mondiale, et cela se ressent dans toute la littérature de cette période. Au travers de ce microcosme enfantin, William Golding reproduit un miroir de notre société. Il tente de nous démontrer que la civilisation est fragile et que le retour à l’état sauvage n’est jamais très loin. Mais surtout que les êtres humains sont violents et ont tendance à ne pas endosser la responsabilité de leur barbarie quand elle est diluée dans une action commise par un groupe entier.

Avec le monstre et le culte satanique que certains enfants finissent par lui vouer, on peut y voir une critique de la religion, mais aussi et surtout une analogie avec le nazisme et les personnes qui ont préféré accepter ce régime et y participer pour se protéger, plutôt que de prendre des risques en le combattant. Pourtant l’auteur semble souligner la nécessité de s’unir pour que la société fonctionne. Si tout le monde ne participe pas à l’effort, on est sur le déclin (comme avec la construction des cabanes, qui deviennent de plus mauvaise qualité au fur et  mesure que de moins en moins d’enfants participent à leur construction, p. 97). Les plus raisonnables, les plus éclairés sont ceux qui se battent pour rester à l’état d’homme face à l’état d’animal, mais ce sont eux qui prennent le plus cher.

Au final, le plus intéressant ce n’est pas le livre en lui-même – dont la 1e lecture est somme toute banale et sans relief particulier – mais les interprétations que l’on va en faire qui lui confèrent tout son intérêt, et c’est probablement cela qui a érigé ce roman en tant que classique de la littérature britannique. Si tout comme moi vous essayez de parfaire votre culture littéraire, je ne trouve pas cette lecture indispensable tant du point de vue du contenu que de la prose de l’auteur. D’autres classiques valent plus le détour selon moi.


bm_CVT_Sa-majeste-des-mouches_1619Titre : Sa Majesté des Mouches

Auteur : William Golding

Editeur : Folio

Nombre de pages : 246 pages

Prix : 8,5€

Date de sortie : 1954

IBN : 9782070374809

10 commentaires sur “Sa Majesté des Mouches – William Golding

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  1. Je n’ai lu de ce récit qu’une réécriture version science-fiction il y a plus de quinze ans. Les seules choses sont je me souvienne, c’est que j’avais aimé mais ça m’avait fait peur, et le titre : « Sa Majesté ses clones ». Eh bien ça ne m’avait pas, alors, donné envie de lire ce classique. De fait, après avoir lu ta chronique, on ne peut pas dire que j’ai plus envie !
    Merci pour ton retour ☺

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  2. Comme quoi, on ne réagit pas tous de la même façon à une œuvre ! Pour le coup, moi, je l’avais beaucoup aimé (bien que je sois restée un peu sceptique sur le fait de la classifier en rayon jeunesse) mais peut-être justement parce que tout le cheminement d’analyse se faisait, pour moi, au fur et à mesure de la lecture et non après. Du coup, ce n’est pas tant l’histoire elle-même qui m’a captivée, mais le chemin psychologique qui mène les gamins à agir comme ils le font. Et, contrairement à toi, je suis loin d’être sceptique sur le fait qu’ils aient pu être menés si facilement au meurtre. La propension à la répétition d’un modèle vu et connu de tous, au mysticisme, aux syllogismes, à la déresponsabilisation… Tout ça me paraît très concret et réaliste. Mais je suis peut-être juste une très grosse pessimiste sur la nature humaine^^’ En même temps, ça me renvoie beaucoup à l’expérience de Milgram et à toutes celles, similaires, qui ont été faites depuis et qui en arrivent toujours à la même conclusion : la dilution de la responsabilité individuelle qui peut mener à bien des horreurs !
    Bref, merci pour cet article, car même si tu n’as pas tant accroché à ce livre, tu en fais très bien ressortir les enjeux 🙂

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      1. Si ce genre d’expériences t’intéresse, je te conseille « Zone Xtrem » qui est la même expérience mais version jeu télévisé et l’expérience de l’ascenseur, sur le conformisme ^^

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  3. C’est une très bonne analyse et je suis somme toute d’accord. C’est à lire une fois mais je ne le relirai pas forcément comme d’autres classiques dont je ne me lasse pas

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